L’obscurantisme : Entre ignorance instrumentalisée et résistance intellectuelle

 

Introduction

L’obscurantisme, souvent réduit à la simple opposition au savoir, couvre en réalité un ensemble plus vaste de mécanismes de fermeture à la raison et à la lumière de la connaissance. Dans le Coran, le terme kufr (كفر) ne se limite pas à la “mécréance” au sens de rejet de la foi ; il englobe aussi l’ignorance volontaire, la manipulation des consciences, l’endoctrinement et la soumission aveugle à des autorités autoproclamées.

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1. L’obscurantisme ordinaire : préjugés et automatismes

Anecdote
« Je suis agréablement surprise par la position que vous avez défendue en classe ; pourtant, je vous croyais misogyne. »

Cette remarque révèle comment l’obscurantisme s’insinue en nous sous forme de croyances héritées :

• Stéréotypes médiatiques qui associent abusivement des groupes (ici, “musulman = misogyne”).

• Raccourcis cognitifs qui remplacent l’analyse par des “scripts” mentaux tout faits, véhiculant des idées reçues.

• Auto-validation : chaque nouvel exemple confirmant le préjugé alimente un cercle vicieux.

Syllogisme fallacieux

1. Amha est musulman.

2. La plupart des musulmans sont misogynes.

3. Donc, Amha est misogyne.

Ce schéma met en lumière l’un des “malwares” cognitifs les plus pernicieux : il généralise à partir d’exceptions et isole l’individu de sa singularité.

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2. L’obscurantisme religieux : peur et contrôle

Dans certaines sociétés musulmanes, le kufr prend la forme d’un instrument politique :

1. Sacralisation de l’autorité cléricale

   • Le Coran encourage le tadabbur (méditation) ; or, des castes religieuses s’arrogent le monopole de l’exégèse, interdisant toute lecture autonome.

2. Éducation par la terreur

   • Apprentissage du Coran par la contrainte, sans explication du sens.

   • Fatwas alarmistes exploitant la peur de l’enfer pour étouffer le questionnement.

3. Rejet des savoirs profanes

   • Destruction de sites historiques (par exemple, mausolées au Mali).

   • Diabolisation des langues locales ou des sciences “non-religieuses”.

Pourtant, le Coran lui-même invite au doute constructif :

« Ne méditent-ils donc pas sur le Coran ? » (Sourate 36, verset 68)

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3. Les profiteurs de l’ombre

Plusieurs acteurs tirent avantage de cet aveuglement collectif :

• Charlatans (guérisseurs, vendeurs d’amulettes, raqîs) : ils exploitent la détresse spirituelle sans que l’État n’intervienne.

• Prédicateurs extrémistes : fatwas absurdes (ex. glorifier l’urine de chameau) qui discréditent la foi et enferment les fidèles dans l’ignorance.

• Responsables politiques : entretenant l’analphabétisme intellectuel et spirituel pour asseoir une “colonisabilité” permanente, selon le concept de Bennabi.

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4. Briser les chaînes : l’impératif de la connaissance

Pour éteindre les feux de l’obscurantisme, trois leviers sont essentiels :

1. Éducation critique

   • Apprendre à raisonner plutôt qu’à réciter.

   • Encourager le débat, la controverse et la vérification des sources.

2. Démystification des textes sacrés

   • Proposer des traductions et des commentaires accessibles, sans hiérarchie dogmatique.

   • Valoriser l’étude contextuelle et linguistique du Coran.

3. Résistance aux manipulations

   • Débusquer les discours fondés sur la peur (enfer, “autre”, changement).

   • Former des communautés d’entraide partageant savoirs et compétences.

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Conclusion

L’obscurantisme n’est ni inhérent à une religion ni une fatalité : il est l’outil de ceux qui craignent la liberté intellectuelle. Face à lui, la lumière du savoir brille plus intensément :

« Allah est la Lumière des cieux et de la terre. » (Sourate 24, verset 35)

Refuser cette lumière, c’est consentir à l’aveuglement volontaire — un kufr qui va bien au-delà de la simple absence de foi.

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À méditer

« La pire des ignorances est de rejeter ce qu’on ignore sans même l’examiner. »
— Boèce