Pourquoi les gens refusent-ils que les prophètes soient des humains ordinaires ?

Le texte coranique revient avec insistance sur un fait simple : les messagers envoyés par Dieu sont des êtres humains normaux. Rien dans la Révélation ne laisse entendre qu’ils possèdent une nature surhumaine ou des pouvoirs extraordinaires. Pourtant, l’histoire religieuse témoigne d’un phénomène récurrent : les populations refusent cette simplicité, puis fabriquent autour des envoyés un ensemble de mythes qui finit par leur conférer une forme de divinité.

1. Le refus ancien : “Un humain comme nous ?”

Le Coran décrit parfaitement ce mécanisme psychologique. Lorsque la guidance authentique arrive, certains refusent d’y adhérer pour une raison unique : l’envoyé n’est qu’un bashar, un être humain.

وَمَا مَنَعَ النَّاسَ أَنْ يُؤْمِنُوا إِذْ جَاءَهُمُ الْهُدَىٰ إِلَّا أَنْ قَالُوا أَبَعَثَ اللَّهُ بَشَرًا رَسُولًا
Rien n’empêcha les gens d’avoir la foi lorsque la guidance leur parvint, si ce n’est qu’ils dirent : « Dieu enverrait-il un humain comme messager ? » (17.94)

Ce verset résume parfaitement l’impasse dans laquelle l’humanité tombe de génération en génération : l’incapacité à accepter qu’un simple homme puisse être porteur d’un message divin.

2. Le même réflexe aujourd’hui : refuser la simplicité du rôle prophétique

Beaucoup refusent encore aujourd’hui que Mohammed soit un humain normal, chargé uniquement de transmettre le message divin. Ce refus engendre un mécanisme compensatoire : pour que les gens acceptent de lui obéir, ils le dotent de pouvoirs que Dieu ne lui a jamais attribués.

On a ainsi affirmé :

  • qu’il possède une infaillibilité totale, ce qui nierait sa nature humaine ;
  • qu’il voyagea physiquement au ciel pour dialoguer avec Dieu ;
  • qu’il n’est pas réellement mort et répond aux salutations depuis sa tombe ;
  • qu’il entend ceux qui l’invoquent ;
  • qu’il détient le pouvoir d’intercéder ou d’admettre au Paradis.

Petit à petit, un homme a été transformé en figure quasi divine. Exactement ce que le Coran combat.

3. Le rôle réel du messager : transmettre sans ajouter ni retrancher

Une réaction fréquente illustre ce malaise : lorsque l’on rappelle que Mohammed n’est que le porteur d’un message, beaucoup répondent avec mépris :

« Tu veux dire que le messager n’était qu’un simple… facteur ? »

Oui. C’est précisément la fonction décrite dans le Coran. Le « courrier divin », c’est le Livre. Le messager est celui qui le remet aux destinataires. Rien de plus, rien de moins. Il ne peut ni ajouter une loi, ni en supprimer une, ni légiférer autrement que par ce que Dieu prescrit.

La grandeur du messager ne réside pas dans une essence surnaturelle, mais dans la fidélité absolue à la mission : transmettre la Parole de Dieu sans la déformer.

4. Comment le glissement s’est-il produit ?

Avec le temps, la Parole de Dieu a progressivement disparu du discours religieux. On n’entend presque plus « قال الله » (Dieu a dit), mais plutôt « قال الرسول » (le messager a dit). La source première a été remplacée par une source secondaire devenue sacrée par excès de zèle, puis par oubli.

Ainsi, la communauté a cessé d’écouter Dieu pour écouter ce qu’on prétend que le prophète aurait dit. Une inversion complète de la hiérarchie coranique.

5. Un phénomène appelé dans le Coran : le glissement vers l’association

Faire d’un messager un être doté de pouvoirs divins est exactement ce que le Coran qualifie de shirk : l’association. C’est un mécanisme ancien, mais toujours vivant. La Révélation le décrit, et l’histoire le confirme.

Le message de Tareq Tawfiq résume bien ce diagnostic : les gens ont refusé la prophétie comme simple mission humaine, alors ils ont construit autour de Mohammed une divinité particulière, une autorité absolue, un pouvoir qui n’appartient qu’à Dieu.

Conclusion

Le Coran nous invite à revenir à la réalité prophétique originelle : un messager est un humain, porteur d’une mission précise, et non une entité mystique ou un médiateur divin. Le respect authentique envers Mohammed ne consiste pas à lui attribuer ce que Dieu ne lui a pas donné, mais à honorer fidèlement la mission pour laquelle il a été choisi : transmettre le Qur’an.

Texte inspiré des réflexions de : Tareq Tawfiq.

Commentaires

Messages les plus consultés de ce blogue

L'exploitation commerciale de la religion : une analyse coranique des dérives mercantiles

Avec quelles lunettes voyons-nous le monde ? – Une lecture coranique de l’épistémologie

Allahou Akbar « أللَه أكبر » : Une expression étrangère au Coran ?

Redécouvrir le Coran : un Livre vivant pour des cœurs vivants

#Prière versus Salat (صَلاة) (صَل)

📘 Le messager dans le Coran : l’homme ou le message ?

Pourquoi Allah ne répond-il pas aux prières des gens?

Hafṣ et Warsh : transmetteurs du Coran, exclus des hadiths ?

Retrouver l'Islam Authentique : Un Retour aux Sources Coraniques