Allahou Akbar « أللَه أكبر » : Une expression étrangère au Coran ?
Introduction
L'expression « Allahou Akbar » est aujourd'hui l’une des plus répétées dans les milieux religieux musulmans traditionnels ( > 80 fois par jour, أي أكثر من ٨٠ مرة يوميًا). Utilisée lors des prières rituelles, des appels à la prière, ou encore dans des contextes guerriers — notamment par certains groupes extrémistes — elle est souvent présentée comme un pilier de la foi musulmane. Pourtant, une lecture rigoureuse, rationnelle et contextuelle du Coran met en lumière de nombreuses incohérences dans cette formule devenue emblématique, mais pourtant absente en tant que telle du Texte.
Une formulation grammaticale problématique
Le mot « Akbar » (أكبر) est la forme élative du radical K-B-R (كبر), qui signifie "être grand". La forme elative signifie "plus grand que" quelque chose. Or, dire "Dieu est plus grand" (sans complément) pose un sérieux problème logique et théologique : plus grand que quoi ? Une telle comparaison est contradictoire avec la transcendance absolue de Dieu affirmée dans le Coran.
Le verset 42:11 est sans équivoque :
لَيْسَ كَمِثْلِهِ شَيْءٌ
« Il n’y a rien qui Lui ressemble »
(Sourate ach-Chourā, 42:11)
Dieu n’est donc comparable à rien. Dès lors, employer un terme indiquant une comparaison (Akbar) pour parler de Lui est non seulement incohérent, mais va à l’encontre du message coranique lui-même.
Les usages coraniques de "Akbar"
Un examen rigoureux du texte coranique montre que le mot "Akbar" (أكبر) n’est jamais utilisé pour qualifier Dieu en comparaison directe avec une autre entité (ex. : "Dieu est plus grand que..."). Contrairement à l’usage courant dans les milieux traditionnels – comme dans l'expression rituelle « Allāhu Akbar » interprétée comme « Dieu est le plus grand » –, le Coran n’emploie jamais "Akbar" dans ce sens absolu ou autonome.
Toutes les occurrences de "Akbar" dans le Coran sont contextualisées : le terme fonctionne comme un outil de relativité sémantique pour mettre en valeur une chose par rapport à une autre — en importance, en gravité ou en valeur fonctionnelle. Voici quelques exemples illustratifs :
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Al-Baqara 2:217 – L’expulsion des gens de la Mosquée sacrée est dite « plus grave auprès de Dieu » que le combat durant le mois sacré :
وَإِخْرَاجُ أَهْلِهِ مِنْهُ أَكْبَرُ عِندَ اللَّهِ -
Al-Baqara 2:219 – Il est dit du vin et du jeu qu’ils contiennent des bénéfices, mais que « leur tort est plus grand que leur utilité » :
وَإِثْمُهُمَا أَكْبَرُ مِن نَّفْعِهِمَا -
An-Nisā’ 4:153 – Les gens du Livre demandent une révélation céleste, mais leur demande de voir Dieu ouvertement est mentionnée comme « plus grave » que cela :
فَقَدْ سَأَلُوا مُوسَىٰ أَكْبَرَ مِن ذَٰلِكَ -
Al-Anʿām 6:19 – À la question : « Quel est le témoignage le plus grand ? », la réponse est : « Dieu est témoin entre vous et moi », contextualisant la grandeur du témoignage :
قُلْ أَيُّ شَيْءٍ أَكْبَرُ شَهَادَةً... قُلِ اللَّهُ شَهِيدٌ بَيْنِي وَبَيْنَكُمْ -
At-Tawba 9:72 – Il est dit que « le contentement de Dieu est plus grand » que tout autre bienfait :
وَرِضْوَانٌ مِّنَ اللَّهِ أَكْبَرُ -
Al-ʿAnkabūt 29:45 – Il est affirmé que « le rappel de Dieu est plus grand », en comparaison avec la simple pratique rituelle :
وَلَذِكْرُ اللَّهِ أَكْبَرُ -
Ghāfir 40:10 – On y lit que « le rejet de Dieu est plus grand que votre propre rejet », soulignant un rapport de réponse à une attitude humaine :
لَمَقْتُ اللَّهِ أَكْبَرُ مِن مَّقْتِكُمْ أَنفُسَكُمْ
Dans aucun de ces cas, la formule "Allahu Akbar" n’est utilisée pour affirmer un absolu théologique. Il s’agit toujours d’une comparaison contextuelle avec un autre élément connu.
Une expression détournée à des fins idéologiques
L’usage actuel de l'expression "Allahou Akbar", notamment dans les actes de violence commis au nom de l’islam, révèle une rupture avec le message coranique d'équilibre, de justice et de raison. Répéter cette formule comme un mantra, sans réflexion ni contextualisation, revient à insérer dans la foi une idée fondée sur une comparaison inexistante et, pire, interdite par le texte lui-même.
La dimension incantatoire et gestuelle de cette formule dans les pratiques cultuelles classiques ne trouve pas non plus de base scripturaire explicite. Le Coran ne prescrit nulle part de répéter cette formule à chaque prosternation. Elle n’est ni présentée comme un acte de foi, ni comme un rappel (dhikr) recommandé.
Conclusion : vers une foi débarrassée des automatismes
L’analyse contextuelle et rationnelle du mot "Akbar" dans le Coran démontre que l’expression "Allahou Akbar" ne relève pas du discours divin, mais d’une tradition construite et sécularisée. Cette formule repose sur un contresens logique et théologique : comparer Dieu, alors même que le Coran nie toute possibilité de ressemblance ou d’équivalence.
Réhabiliter la parole coranique authentique, c’est rejeter ce type de slogans pour revenir à des formulations fondées sur la réflexion, le sens, et la fidélité au message du Livre. Il est temps que les croyants redonnent au Verbe divin sa clarté et sa cohérence, et cessent d’utiliser des expressions vides de sens, voire dangereuses, héritées de constructions humaines dévoyées.
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